Alors que nous nous trouvons en période estivale mais que le service reste ouvert aux familles déjà accueillies, nous sommes sollicités pour recevoir une nouvelle dyade mère-enfant. En l’absence de la cheffe de service, en congés, il est demandé à une des psychologues de mener, conjointement avec une éducatrice de jeunes enfants, un entretien avec une mère et son enfant, en demande de soutien éducatif. Ce qui est appelé au sein du service, un « entretien d’accueil ».
Dans le projet et les habitudes de l’Espace petite enfance, c’est la cheffe de service qui assure cet entretien aux côtés de l’éducatrice de jeunes enfants, qui sera généralement, la référente de cette famille. Cet entretien fait suite aux échanges avec les professionnels ayant adressé la famille, une réflexion en équipe sur la pertinence de cet « accueil » et un appel téléphonique direct avec le parent pour convenir du rendez-vous.
L’entretien que nous abordons ici, relève donc de l’exceptionnel dans le fonctionnement du service. Il s’agit en l’occurrence, d’une jeune femme et de son enfant de quelques mois. Elle a été orientée vers nous par une structure qui l’héberge depuis cinq mois. Cette mère est en difficulté avec son bébé, elle a déjà pu envisager de le confier à l’Aide Sociale à l’Enfance, elle est très isolée, se dit désespérée et peut être agressive.
Cette rencontre nous permet de faire connaissance avec la mère et l’enfant, de présenter l’établissement et le service. La jeune femme semble rapidement en confiance, elle est accompagnée par l’éducatrice du lieu qui l’héberge mais cette dernière a choisi de ne pas participer à l’entretien.
La psychologue et l’éducatrice de jeunes enfants présentent, à tour de rôles, l’accompagnement qui peut être proposé à cette dyade, ainsi que le travail spécifique de chaque professionnelle puis commencent à recueillir les informations pouvant permettre d’évaluer ses besoins.
Ainsi la psychologue, qui avait reçu par téléphone la demande de l’éducatrice-partenaire, s’autorise à interroger la mère sur le soutien psychologique dont elle a pu bénéficier depuis sa grossesse. Elle sait que la mère a déjà refusé certaines orientations vers des lieux de soins psychiques. Un climat de confiance ayant pu s’instaurer au cours de l’entretien, elle se sent suffisamment à l’aise pour proposer d’emblée à la mère de la recevoir pour des consultations psychologiques durant la période d’accompagnement à l’Espace Petite Enfance. Ce à quoi la mère répond positivement sous réserve que cela se passe bien. Elle exprime clairement le besoin de prendre le temps de réfléchir à la place qu’elle pourrait faire dans sa vie à cet enfant qui est arrivé sans qu’elle ne l’ait souhaité.
Cette première rencontre permet alors à la psychologue de faire son évaluation des besoins d’aide psychologique de la famille et de pouvoir penser son travail auprès d’elle et auprès de l’équipe, en amont et de façon autonome. Cela est différent du contexte habituel du travail avec les familles lorsqu’elles sont reçues par les autres membres de l’équipe qui exposeront la situation de la famille lors d’une réunion d’équipe et qui seront potentiellement demandeuses de l’intervention de leur collègue psychologue, dans un second temps de l’accompagnement.
Cette situation nous amène donc à réfléchir à la pertinence de la présence des psychologues lors des entretiens dits « d’accueil », représentantes de leur fonction au même titre que les Educatrices de Jeunes Enfants, donnant ainsi une représentation claire de l’équipe, des fonctions qui œuvrent en lien, en partage et en réflexion au maillage de l’accompagnement de la famille. Dans le projet de l’Espace Petite Enfance, le rôle des psychologues semble de façon évidente, pensé comme indispensable. Cependant, l’autonomie du travail, les liens directs avec les familles, la spécificité des compétences professionnelles pourraient être réfléchis de façon plus approfondie. Cette situation clinique nous donne peut-être l’opportunité de le faire.
Héloïse Hanaut-Courtier, psychologue clinicienne